Par Coutechève Lavoie Aupont
Annulez tout: festivals, concerts, spectacles. A double tours, fermez toutes les portes, madame COVID-19 est là. Voilà à quoi nombre de bibliothèques, centres culturels et autres espaces d’animation ont été confrontés pendant la période du confinement. Devant toutes les prévisions et les menaces qui planaient sur le pays, les responsables de la Bibliothèque Issa Fatiman ne voulaient pas sombrer et emprunter une telle voie. Il fallait faire quelque chose. Il fallait agir en toute sécurité, en respectant les principes barrières et de distanciation sociale. En ce qui les concerne, il était crucial aussi de continuer à desservir ses fidèles lecteurs et lectrices.
Dans leurs têtes de passionnés et responsables résonnaient, comme un glas, ces mots de Jacques Stephen Alexis: « Je ne voudrais pas que tu laisses dormir ton intelligence. Quand on laisse dormir son intelligence, elle se rouille, comme un clou, et puis on devient méchant sans le savoir… ». Alors l’urgence d’agir devenait urgente et vitale. C’était une question de vie ou de mort. Et s’il faut mourir, je préférerais que les membres de la bibliothèque le soient au moins un livre à la main, a martelé la coordonnatrice Mme Abydarlyne Jouth. Agir et garder vivante la flamme de la lecture allumée dans les yeux de la jeunesse de Lascahobas et des alentours est notre combat. Initié, il a y a déjà plus de six (6) ans, ce lectorat grandissant est motivé et demeure avide comme à ses débuts. Et plus tard, c’est avec ces mots du cœur, lâchés comme un poème que la bibliothèque Issa Fatiman du Sant Kiltirèl Lawouze entame sa principale activité du confinement:
An n li pou n aprann
Nan aprann n ap konprann
Nan konprann n ap pran konsyans
Lè n pran konsyans
N ap pran pozisyon
E nan pran pozisyon
N ap goumen
Nan goumen Lavi n va miyò.
An n li pou lavi n miyò!
An n miyonnen Lavi!
Comme un rescapé d’une noyade, «Li pou miyonnen lavi» est né en plein milieu du confinement. Avec un but clair et précis: continuer et pérenniser les activités littéraires et culturelles auprès des lecteurs et des particuliers. La bibliothèque Issa Fatiman ne fait pas que raviver le goût de la lecture chez les jeunes. Elle apporte le livre, cette fois chez les lecteurs et lectrices. Elle démocratise la lecture et la rend plus que jamais à portée de main. Le risque de perdre les livres est énorme. Mais rassurez-vous, la satisfaction des bénéficiaires et des initiateurs est immense.
Lancée au mois de juin 2020, l’activité consiste à proposer, sous forme de prêt, une lecture à un.e confiné.e. chez lui. Pendant une durée de quinze (15) jours, les lecteurs ou lectrices à leur rythme lisent et produisent un résumé de l’ouvrage choisi. Au quatorzième jour du prêt, la bibliothèque récupère le livre. Les participant.e.s de leur côté enregistrent une vidéo, à l’aide d’un téléphone portable, dans laquelle ils ou elles présentent le résumé de l’ouvrage. La vidéo du résumé est envoyée sur un forum de discussion créé pour l’activité. C’est l’occasion maintenant pour les participants et les organisateurs de débattre, discuter, commenter en visio-conférence. Ensuite la vidéo est ensuite postée, diffusée sur les réseaux sociaux: WhatsApp, Facebook et Instagram pour appréciation et le bonheur de tous.
Pendant et après le confinement, une trentaine de jeunes des deux sexes ont pris part à cette première partie qui, d’entre de jeu, s’avère une réussite incontestable. On peut en juger par la qualité des résumés réalisés par les lecteurs et lectrices. Considéré malgré tout comme une édition d’essai, le comité de direction de la Bibliothèque Issa Fatiman et du Sant Kiltirèl Lawouze souhaitent pouvoir intégrer plus de participants à l’avenir.
A ce jour, « Li pou miyonnen lavi» a évolué, confient les organisateurs. La seconde étape est en vue. Bientôt cette initiative investira l’espace des établissements scolaires. Des pourparlers avec les directeurs d’écoles sont très concluants. L’objectif que poursuivent les responsables de la Bibliothèque Issa Fatiman est de créer un club de lecture et d’animation dans chaque école de Lascahobas et des autres communes de l’arrondissement. Toujours est-il que les moyens et les matériels nécessaires à la continuité d’un tel projet ne sont pas au rendez-vous.
Entre-temps, on ne peut que souhaiter longue vie à une telle entreprise. Puisse le Sant Kiltirèl Lawouze et la bibliothèque Isssa Fatiman trouver les aides et gratifications adéquates à sa survie et au développement de ses diverses actions.