Par James Pubien
Encore une nouvelle édition, l’aventure En Lisant se poursuit tout en s’incrustant davantage dans l’agenda culturel des grands événements de la période estivale en Haïti. La quatrième édition qui va se dérouler sur fond de contestations et de troubles politiques ne revendique que la singularité humaine du monologue en gage d’un possible dialogue.
Pour cette édition, le concept de dialogue est au centre des préoccupations artistiques de la Direction du festival. Comment établir une passerelle entre le vécu triste du peuple haïtien et la Chose artistique ? Comment porter une parole altruiste devant lier l’isolement du couple personnage/personne à l’intimité du public, cette foule anonyme qui ne se manifeste qu’au rythme de la représentation.
Tout ceci amène à une énième tentative de libérer la parole dans un pays où dialoguer peut être résumé à se parler à soi-même.
En Haïti, libérer la parole revient aussi à inverser les rôles, à donner la parole à la ma- jorité, aux femmes. À renouveler les voix qui s’épuisent depuis un certain temps, à faire du neuf avec la voix intérieure des victimes du bâillonnement de la parole. Pour cela, l’ensemble des représentations sera porté par des interprètes féminines, ce parti pris artistique souhaite renverser le symbolisme du «qui a le droit d’être cité».
Ce parti pris est aussi une manière de mettre en exergue la contribution des générations de femmes qui se sont succédé sur les scènes du pays. Un clin d’œil en guise d’hommage à leurs travaux qui sombrent lentement dans l’oubli. Comment arrive-t-on à oublier les performances de Magali Comeau Denis, de Michèle Lemoine, de Toto Bissainthe, de Magali Marcelin, de Ginette Monpremier Beaubrun… Comment concilier les expériences d’hier et celles d’aujourd’hui ?
Dans ce souci le festival a choisi de faire un focus sur le travail de création de deux artistes de deux générations différentes. Une mention spéciale est accordée à la création de Michèle Lemoine et de Sachernka Anacassis. Une forme de passation de témoin entre deux écoles de dramaturgie.
Encore une nouvelle édition, En Lisant Enfin Seul, avec une programmation variée invitant le public à circonscrire la parole dans la quadrature d’une altérité recherchée, a comme fil d’Ariane le monologue, ─cet ar(t)bre qui a trop longtemps masqué la forêt des dialo- gues contradictoires.