Evelyne Trouillot, écrivain. Source :Etonnants Voyageurs
Par Valéry Gérôme
Cette année, malgré les difficultés causées par la COVID-19, Livres en folie étant l’une des plus grandes manifestations culturelles dans la Caraïbes, ne chôme pas. On se souvient encore de l’édition 2019 qui a eu lieu contre vents et marées où la foire avait accueilli l’académicien Dany Laférrière comme invité d’honneur. En 2020, dans un contexte assez spécial, c’est Évelyne Trouillot qui endosse le titre d’invitée d’honneur.
Ecrivain, dramaturge, poétesse et essayiste », depuis 1996 elle évolue dans le secteur culturel haïtien où elle avait débuté dans la categorie de nouvelles. son premier recueil de nouvelles, »La chambre interdite »,a été publié chez L’Harmattan en France. Auteure de plus d’une dizaine de livres publiée dans des éditions comme les éditions Dapper avec son premier roman Rosalie l’infâme (prix de la romancière francophone), ou les éditions Hoëbeke, avec ” La mémoire aux abois” qui lui a valu le “prix Carbet » prix majeur des littératures Caraïbes » pour ne citer que celles-là. Évelyne Trouillot est l’un des fondateurs du centre culturel Anne- Marie Morisset. Dans une interview accordée à l’agence en ligne Sibelle Haïti l’invité d’honneur de livre en folie donne son impression par rapport à sa participation.
Sibelle Haïti : Invitée d’honneur à Livres en folie, dans un contexte assez spécial, cela veut dire quoi pour vous?
Évelyne Trouillot : C’est une édition spéciale car nous vivons une situation tout à fait extraordinaire. Nous faisons face à une pandémie qui affecte nos vies au quotidien et qui constitue une menace sanitaire pour l’ensemble de la population. Tout en participant à Livres en folie, comme invitée d’honneur, je ne peux oublier ce contexte et j’espère vivement que cette pandémie ne sera pas une catastrophe de plus pour notre pays. Lorsque j’ai accepté avec plaisir l’invitation d’être invitée d’honneur de cette édition, c’était bien avant la pandémie, et deux invités devraient être à l’honneur : Louis-Philippe Dalembert et moi. La covid-19 a malheureusement changé ce qui était prévu et obligé les organisateurs à adopter d’autres stratégies pour faire face aux contraintes et limites imposées par la pandémie. Livres en folie tente de s’adapter à la situation en offrant des activités virtuelles et des ventes en ligne. J’espère que les habitués de la foire visionneront les rencontres prévues, participeront autant que possible aux activités, consulteront le catalogue en ligne et achèteront les livres puisque pour les lecteurs il y aura toujours les déductions qui rendent les livres plus abordables.
Sibelle Haïti: Parlez-nous des livres que vous aurez en signature. Les genres ?
Évelyne Trouillot : J’aurai plus d’une dizaine de titres, un mélange de nouveautés, d’anciens titres, de nouvelles éditions. De la fiction et de la poésie et des livres jeunesse. Un titre qui sera certainement présent est Rosalie l’infâme, mon premier roman paru en 2013, traduit depuis en italien, espagnol et anglais. Il est à sa deuxième édition et en Haïti et en France. Aux cotés de Rosalie l’infâme, je présente un nouveau roman Désirée Congo dont l’action se passe à Saint Domingue à la veille de la bataille de Vertières. Un recueil de poésie créole Yon kòd Gita fera aussi partie des nouveautés. Des poèmes qui évoquent des thèmes différents mais qui ramènent à la vie : l’amour, l’amitié, l’absence, la mémoire, entre autres. Toujours en poésie il y aura Plidetwal, mon premier recueil de poésie créole. Dans la liste, vous trouverez aussi La mémoire aux abois, le roman autour de la dictature des Duvalier et de son impact sur la mémoire d’un peuple également, le roman Le mirador aux étoiles, et son histoire de secrets de famille, de préjugés et de tabous. De même que L’œil-totem, l’histoire d’une octogénaire, artiste, attachée à ses valeurs, indépendante et téméraire. Sans oublier Le rond-point, roman qui a bénéficié de la Bourse Barbancourt en 2015, et qui évoque un sujet malheureusement encore d’actualité chez nous, le kidnapping, mais dévoile aussi les écarts et fissures entre les différentes catégories sociales.
Sibelle Haïti: Avez-vous un ou des nouveaux livres? Si oui, dans quelles éditions? Quels sont les titres ?
Évelyne Trouillot : Un nouveau roman Désirée Congo sort aux éditions Cidihca. C’est une histoire qui se passe juste avant la bataille de Vertières et a pour personnage central une jeune femme au comportement excentrique et fantaisiste. Une jeune femme pour le moins attachante autour de laquelle tournent les autres personnages. Il m’a semblé intéressant d’explorer les blessures psychologiques qu’un système inhumain tel que l’esclavage pouvait provoquer chez les captifs, hommes, femmes et enfants mis en esclavage. Ce fut l’occasion aussi de penser à tous les possibles, toutes les zones inexplorées par les livres d’histoire, les comportements sans doute jugés marginaux et pas toujours relevés.
Il y a aussi un nouveau recueil de poésie que j’ai mentionné plus haut, Yon kòd gita, qui sort aux Edisyon Freda.
De nouvelles éditions sont aussi au rendez-vous. Parlez-moi d’amour un recueil de nouvelles, paru pour la première fois en 2003, sort avec une préface de Chantal Kénol. Pour les récits jeunesse deux titres sont réédités et remaniés aux éditions Porte-plume, Ma maison en dentelles de bois et Une cousine inattendue.
Sibelle Haïti: Quelle sont vos attentes pour cette 26e édition? Qu’attendez-vous de votre public?
Évelyne Trouillot: C’est une édition spéciale comme nous le savons tous. La pandémie de covid-19 oblige les organisateurs à adopter de nouvelles stratégies pour permettre au public d’avoir accès aux livres tout en respectant les consignes de sécurité sanitaire. J’espère que les habitués de Livres en folie pourront bénéficier de ces jours de rencontres virtuelles autour du livre, de ce focus sur les livres. Dans cette atmosphère de tension, d’inquiétude et d’angoisse, les livres constitueront une ouverture vers un peu plus de recul et de distance émotionnelle. Ils permettront un plongeon dans d’autres univers non pas pour oublier mais pour mieux nous armer pour affronter nos réalités.
Sibelle Haïti : Quel est votre message pour les habitués de Livres en folie?
Évelyne Trouillot : Je regrette sincèrement que cette édition dans sa formule inédite de ventes exclusivement en ligne, – décision dictée par la pandémie !- ne me permette pas de rencontrer physiquement les lecteurs. C’est un moment privilégié quand un auteur peut échanger avec ses lecteurs et lectrices, écouter leurs ressentis sur un livre ou un personnage. Ces rencontres se révèlent toujours pour moi enrichissantes. Je vais m’atteler aussitôt que la situation sanitaire le permette, à créer de telles opportunités et je donne d’ores et déjà un autre rendez-vous aux lectrices et lecteurs.