Par Mérès Wèche
On peut dire tout ce qu’on veut de ce nouveau gouvernement en Haïtiː lui souhaiter la bienvenue ou le vouer aux gémonies. Toutefois, rien ne peut m’empêcher de saluer l’avènement de Pradel Henriquez comme ministre de la Culture.
“Enfin Malherbe vint “, s’écria Nicolas Boileau, dans son art poétique, au XVIIe siècle, quand la poésie frisait la débandade, comme aujourd’hui bien de systèmes de gouvernement en Haïti. Poète-ministre, Pradel Henriquez sait tout que ça lui prend d’inspiration politique pour ressembler à André Malraux qui, en 1959, avait accepté de devenir ministre de la Culture et de la Communication, sous Charles de Gaulle en France. En autant qu’on accorde une certaine importance à la “Culture“ dans le prochain budget, et qu’on donne à ce ministre les moyens de sa politique. Dans les pays sérieux, culture ne rime pas avec “ madigrature“.
Dans le “Chant I“ de son art poétique, Boileau écrivaitː
“ Ô vous donc qui, brûlant d’une ardeur périlleuse
Courez du bel esprit la carrière épineuse “…
C’est comme si, tel un Nostradamus, ce critique du Siècle des lumières voyait déjà venir en Haïti ce bel esprit, embrassant une carrière, dans un contexte extrêmement difficile.
Pradel Henriquez, ministre de la culture dans ce nouveau gouvernement, me ramène à ces deux autres vers de notre poète classique, dans son même “ Chant I“ ː
“ Mais, pour y parvenir,
Le chemin est glissant et pénible à tenir “…
Convenez avec moi du message contenu dans ces autres vers ː
“ Et poursuivant Moise au travers des déserts,
Court avec Pharaon se noyer dans les mers “ …
En effet trois siècles après Boileau, quand André Malraux accepta ce poste en France, il posait les conditions d’une réelle Révolution culturelle, comme on en a vues en Chine et au Québec ; cette dernière société battait de l’aile après nous dans les années 40-50. La Cité de l’exposition, sous Dumarsais Estimé, précéda l’Expo 67 de Montréal.
En effet, c’est avec André Malraux que naquit le concept de “ Ministère de la Culture et de la Communication“ ; il le concevait dans le cadre d’un bel élargissement du champ culturel, sorte d’inventaire des Beaux-artsː architecture, peinture, sculpture et gravure, mais aussi de la musique, de la danse, des arts de la rue, du cinéma, du théâtre, de l’opéra, des arts décoratifs, des monuments historiques, y compris toutes les écoles correspondantes.
Avec Pradel Henriquez, si les vagues politiciennes ne l’emportent prématurément, nous espérons une redéfinition des missions du Ministère de la Culture en Haïti, dans l’organisation de ses attributions comme moteur d’une Révolution culturelle au pays.
N.B– Cet article est libre de tout intérêt incitatif, comme on peut le prétendre. Je prête souvent ma plume à ceux et celles que je ne connais même pas.