Par Walner Olivier
L’essai du communicateur social Jean Marc Sénatus, « Responsabilité du communicateur face à l’’auditoire- 3 éléments de base à considérer », paru aux éditions CorrectPro en 2021, assigne une place fondamentale à l’instance interlocutrice -au sujet interprétant- dans les pratiques discursives, interactives ou dialogiques.
Un geste de justice communicationnel à l’auditoire, terme rhétorique se situant hiérarchiquement entre le public et l’interlocuteur (R. Amossy, 2000).
Dans cet ouvrage renfermant les fondamentaux de la communication sur une centaine de pages, on décèle que l’interlocuteur est un facteur à reconstituer pour arriver à des échanges langagiers judicieux.
Communicateur social, Jean Marc Sénatus sert aux lecteurs une œuvre didactique utile portant sur la communication. Il évoque tout un ensemble d’approches théoriques élaborées en Sciences de la communication et en Sciences du langage (Linguistique) en vue de permettre d’avoir une compréhension des enjeux des pratiques communicationnelles dans les relations humaines.
Dans son schéma de communication triangulaire, l’auteur propose trois éléments clés qui doivent être pris en compte pour éviter tout malentendu, pour aboutir à une communication réussite.
Trois syntagmes interrogatifs essentiels constituant le socle autour duquel tourne le processus communicationnel.
Il s’agit de ces trois pôles : Qui (communicateur) -Quoi (message) -A qui (récepteur) L«’émetteur, le récepteur doivent être en harmonie et compréhensibles lors des échanges à travers les message transmis, car aucune communication ne sera possible ni s’établira si ces éléments sont discordants » (p.43), souligne le communicateur Sénatus.
Si une place n’est pas dévolue à l’interlocuteur, le locuteur est tout simplement dans une sorte de transmission d’information, de description pour ne pas dire une « illusion descriptive » pour reprendre cette notion J. L. Austin. Cela dit que les sons de la paroles mobilisés pour produire les énoncés n’auront pas l’effet escompté si le sujet interprétant est considéré commune un simple récepteur passif. Car la communication est la relation. Elle est échange, dialogue entre les actants de discours.
Comme le postule Aristote, il y a trois (3) choses à tenir en estime dans un discours/ un acte de communication. Ce sont l’orateur, ce dont on parle et l’auditoire. Ainsi, tout potentiel orateur ou locuteur qui va produire des énoncés doit tenir compte de son vis-à-vis, c’est-à-dire son auditoire, son interlocuteur afin d’empêcher les quiproquos, tout échec dans le processus communicationnel. Un tel processus doit être socialement institué. Le message doit être adapté suivant la compétence communicative du sujet interprétant. Le locuteur- le message- et l’interlocuteur/auditoire sont trois pôles devant être en harmonie. Ils représentent des facteurs fondamentaux pour la communication directe et celle dite médiatisée, dans l’audiovisuelle ou la scripturalité.
C’est l’autre qui est en face du locuteur qui facilite la mise en discours de ses pensées pour signifier. L’énoncé socialement émis dans un rapport interactif ou monologal n’est pas une peinture de l’esthétique pure destinée à être contemplée. Comme le fait montre le linguiste Dominique Maingueneau (1999) dans son texte « ethos, scénographie, incorporation », l’énoncé est tendu vers « un co-énonciateur qu’il faut mobiliser pour le faire adhérer physiquement à certain univers de sens », le faire coopérer pour mieux agir. Pour que le discours puisse avoir l’effet visé, il faut amener l’interlocuteur/destinataire à s’identifier comme un sujet altéritaire.
Cette prise en compte de l’autre est nécessaire. Car « dans la communication, le plus compliqué n’est ni le message, ni le technique, mais le récepteur », écrit l’auteur à la page 46, -citant le spécialiste de la communication et de l’information, le sociologue Dominique Wolton- , dans le péritexte annonçant le chapitre quatrième traitant du facteur « A qui ?». Selon lui, le « récepteur demeure un élément crucial dans tout échange communicationnel. Par cette importance, il doit avoir une considération toute particulière (p.87), met-il en relief. Car l’information est le message, la communication est la relation, dit Wolton.
Cette considération est un acte de justice à l’interlocuteur souvent minoré. Un travail qui met ce dernier dans un rapport d’égalité de valeur avec l’instance locutrice (locuteur/destinateur) pour la réussite de tout acte de communication qui passera par la découverte du message véhiculé et de la reconnaissance de l’autre. Il ne faut pas voir le Tu comme un non-je, mais plutôt comme un je en puissance. Ce schéma triangulaire reconnait que l’harmonie entre « le je et le tu » est fort nécessaire en relation communicationnelle. Une analogie aux recherches du linguiste Antoine Culioli dans sa théorie des opérations énonciatives qui institue la notion de co-énonciateur. Car la production de l’énonciation est l’œuvre de deux sujets parlants, de deux subjectivités.
Ce livre, écrit l’auteur en quatrième de couverture, « se veut un ouvrage instructif et pédagogique, un outil de communication destiné à tout un chacun, particulièrement aux animateurs de groupe, aux enseignants, aux conférenciers, aux communicateurs qui consacrent la majeur partie de leur temps à partager leurs connaissances avec les autres. Cet ouvrage leur inculque certaines techniques, méthodes et stratégies communicationnelles auxquelles ils doivent s’accrocher pour ne pas faire faux bon ni fatiguer leur auditoire lors de la transmission des messages. »