Par Lord Edwin Byron
Après les deux conférences virtuelles données par Evelyne Trouillot et Kettly Mars dans la mâtinée du 19 mai, respectivement au collège Bon Sauveur de Cange et à la bibliothèque Rosalie Bosquet Adolphe de Mirebalais, le théâtre était au rendez-vous à Food Corner dans la soirée à Lascahobas.
30 minutes. Il ne fallait surtout pas plus pour une belle immersion dans l’univers mythique de « La fille à la guitare ». Au son fluide d’un saxophone en demi-teinte, une jeune fille assise avec sa guitare, descend quelques rasades d’alcool. C’est notre Lumane dans sa robe abricot. L’humeur un peu évasive et pâle, soulevant le poids de toutes ses folies.
L’assistance, pour sa part, est attentive. Sous le regard cavaleur des uns et des autres, d’autres voix s’en sont mêlées, dans un agréable jumelage créole-français pour esquisser le récit d’une vie des plus tragiques. Celle d’une chanteuse de grand talent, qui n’était pas seulement celle qui fascinait tout le monde à l’inauguration du bicentenaire sous la présidence Dumarsais Estimé, mais aussi celle qui était en proie à toutes sortes de précarités. Et surtout, cette jeune déshéritée du sort qui dégageait tant de souffrances dans son regard…
Trois jeunes filles: Nephtalie Louis, Suzy Darilee Conserve, Clara Shamandy T. Castel; un tambourineur, J-Zan Tanbou; un saxophoniste, Renel Saint-Clair, tout y était pour une invitation au défoulement et à la méditation. Le projet réalisé sous la houlette du conteur et metteur en scène Chelson Ermoza à partir du récit bilingue d’Evelyne Trouillot, convie à une aventure qui n’est pas des moindres. Celle mettant pleine lumière sur la vie de l’une des légendes incontestées de la musique haïtienne.
Une telle représentation sied bien dans la démarche de Sant Kiltirèl Lawouze (SKL) de rendre un vibrant hommage aux figures féminines de la vie culturelle et historique haïtienne dans le cadre de la 4e édition de Goûter Littéraire. Abydarlyne Jouth, la coordonatrice de SKL, devrait croire que son choix de valoriser le culturel et l’éducatif est tout à fait louable et loin d’être une mince affaire. Le pays en aura encore besoin pour des jours meilleurs, autant que les amant.e.s de la musique attendront, comme à cette soirée, un ou deux morceaux écrits par Jean Claude Martineau pour se rappeller que notre histoire de peuple ne doit pas être jetée aux oubliettes.