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À la rencontre de Nitza Cavalier depuis la Guyane
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À la rencontre de Nitza Cavalier depuis la Guyane

Propos recueillis par James Junior Jean Rolph

Nitza Cavalier est écrivaine et comédienne haïtienne. En décembre 2018, elle a décidé de s’installer en Guyane française. C’est depuis là-bas qu’elle a reçu la nouvelle de l’assassinat de son papa, en 2019. Son spectacle: ‘’J’écris avec du sang’’ qu’elle jouera ce 4 mars 2020, à l’université de Guyane, puise beaucoup dans cette mort redoutable, encore difficile à supporter. SiBelle Haïti a rencontré cette jeune haïtienne pleine d’énergie.

SiBelle Haïti: Les écrivains, à travers leurs œuvres, aiment revenir sur l’enfance. Est-ce aussi votre cas ?  

Nitza Cavalier: Je ne vais pas dire que j’aime revenir sur l’enfance puisque je ne le fais pas couramment. Par contre, j’ai bien un titre inédit qui parle des histoires de mes premiers âges.

S.-H.: ‘’J’écris avec du sang’’ qui se jouera ce 4 mars 2020 à l’université de Guyane, raconte quelle histoire ?  

N.C.: Mon histoire. Une histoire qui pourrait être l’histoire de n’importe quelle jeune haïtienne ou jeune haïtien de ce 21e siècle puisqu’elle traite de la mort, de l’assassinat, de la cruauté de la vie avec la complicité de l’Etat haïtien. Le dramaturge ou l’écrivain doit, selon moi, s’engager pour ses convictions, en y mettant du beau, une touche sublimée dans les règles de l’art. C’est ce que j’ai fait. J’ai écrit une histoire qui raconte l’abscence en y mettant une touche de fiction. J’ai écrit une histoire qui raconte l’assassinat de mon père que j’ai vécu du dehors, sur la terre de Léon Gontran Damas, en y mettant de l’espoir. J’utilise en effet cette cruelle réalité pour planter en moi « le germe de ma plus haute Espérance » dont parle Nietzsche dans son livre Ainsi parlait Zarathoustra. J’utilise mes maux pour écrire… Ce qui est pour moi un acte de vengeance.

S.H.: Vous avez déjà copublié un livre avec votre amie Masselie Galant sur Préfète Duffaut et sa ville imaginaire. Pourquoi une pièce de théâtre maintenant ?

N.C. : Parce que tout comme l’écriture peut me fasciner, le théâtre encore plus. Le théâtre est carrément le meilleur moyen de s’engager corps et âme. « J’écris avec du Sang » est pour moi un acte d’engagement. Un engagement pour l’âme de mon père là où il est. Un engagement pour ma famille. Un engagement pour mes proches. Un engagement pour moi. Donc, cette création ne pourrait être autre chose, qu’une pièce de théâtre!

S.H. : L’actrice Nitza a des mentors ? Des modèles d’écrivains et de comédiens ?

N.C.: J’avais un Mentor, Raoul Junior Saint-Cyr … Des modèles d’écrivains et de comédiens ? Il faut dire que je suis encore à une phase où je me cherche et me re-découvre à chaque fois. Et ceci, que ce soit dans le théâtre, dans l’écriture, où dans l’animation. Bien sûr que j’ai des écrivains et des comédiens qui m’ont marqué et qui me marquent encore; bien sûr que j’ai rencontré des auteurs qui m’aident à garder ma flamme en vie. Nietzsche, par exemple. Mais, sincèrement, je ne me suis jamais dite que je vais suivre tels auteurs ou tels comédiens ou que je les aurai comme modèle.

S.H.: D’où vient cet amour du théâtre ? Quelles sont vos expériences ?

N.C. : Du théâtre lui-même. J’ai débuté avec l’art dramatique au Théâtre National d’Haïti en août 2013. C’est là que j’ai rencontré Raoul Junior Saint-Cyr, tout de suite devenu mon metteur en scène et directeur d’action pour participer à la 10ème édition du Festival Quatre chemins en cette même année, avec la pièce « Illusion » de Dine Cassandre Colin. Je m’en souviens, j’avais 16 ans à l’époque.

Entre 2014 et 2016, il y a eu un blanc. Mais après, soit fin 2016, après avoir bouclé mes études classiques, j’ai continué le chemin qui mène à cette magnifique voie qu’est l’esthetique. En 2017, toujours sous l’oeil de Raoul Junior Saint-Cyr, j’ai mis sur scène la talentueuse comédienne Carelle Chadley Rose-Laura Charles avec la pièce « Je veux montrer mon centre de gravité » traduite en créole pour l’occasion par « Vini m Montre w Nannan m ».

En décembre 2018, je suis déjà en Guyane. Pour faire suite au théâtre qui est comme mon « doudou », Je me suis inscrite au Théâtre de Macouria (TDM)  où je participe, jusqu’ici, à une formation avec le metteur en scène brésilien, Patrick Alves… J’ai également performé, en juin 2019, au Festival des Rencontres de Théâtre Amateur avec la compagnie Kaz Teat qui est une entité du TDM. Et maintenant, me voilà à l’Université de Guyane, le mercredi 4 mars prochain, accompagnée des choristes Benjamin Lyndor, Gayle Sloane Saint-Louis et Dorice Clerfils.

SiBelle Haïti : Comment vous faites pour écrire et jouer en même temps ?  Avez-vous d’autres projets en cours ?

Nitza Cavalier : Écrire et jouer en même temps… C’est faisable… Ce n’est pas facile et ce n’est pas préférable non plus parce qu’en le faisant, l’on se doit de porter un regard durissime sur soi-même. Et c’est ce que je fais. Je porte sur moi ce regard dur pour pouvoir défier la vie! De plus, ce monologue est pour moi un engagement, je devais la jouer. Oui, j’ ai d’autres projets en cours… vous le saurez bientôt… rires… En attendant, j’aimerais que tous ceux et toutes celles qui vivent en Guyane fassent le déplacement afin de partager avec moi ce moment rempli d’émotions et d’énergies. C’est à l’Université de Guyane que cela se passera. AMPHI A. 4 Mars 2020. 18h30.

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