Par Mérès Weche
Quand le cri de liberté gronde aux quatre coins du pays, il me vient à la mémoire ce vibrant poème d’Émile Roumer La Chanson des lambis, cet instrument naturel dont le son « vibrait parmi les champs, les plaines et les bois… ». Ce cri de la conque, transformé aujourd’hui en ondes gravitationnelles, survole monts et mers, jusques aux confins du monde libre.
À Montréal, nous de Beaumont, l’écho de ce cri nous réveille et nous rassemble. À notre troisième réunion en moins de deux mois, le dimanche 16 juin 2019, dans la vaste cour de chez Esther à Longueuil, nous sommes revenus sur « le cri de Chardonnette » qui a répercuté d’un bout à l’autre du monde par la magie de l’Internet.
Ce petit noyau de Co-régionaux, appelé à la table de l’union, tout en partageant un symbolique repas, sentait s’accomplir une prophétie, celle de cette « union qui fait la force », comme l’ont vécue nos aïeux à la fondation de cette patrie commune qu’est Haïti. Nous avons juré, de façon solennelle, d’apporter notre contribution au développement du pays, à commencer par notre village natal, car il faut coûte que coûte sortir du cocon « port-au-plein-ciel » pour mettre la province en valeur.
Elles étaient légion, il y a une vingtaine d’années, les organisations régionales dans la diaspora. Certaines communes du pays en ont profité, mais la tendance est à la baisse aujourd’hui pour des raisons liées à la récession économique mondiale. Cependant, la flamme du « sentiment d’appartenance » n’est pas éteinte, car l’on sent un regain de communication entre l’intérieur et l’extérieur pour le sauvetage national.
La nécessité d’une prise en compte de la diaspora par les décideurs de la nation s’impose, en requestionnant la Constitution de 1987 qui tient à distance nombre de ces expatriés, éminemment qualifiés, dans les affaires politiques de la nation, tout en avalant d’une bouchée leur « dollar-cinquante » au moindre transfert de fonds pour les familles nécessiteuses du pays. La diaspora en a marre d’enrichir les riches qui, de jour en jour, appauvrissent davantage les pauvres.
La solution maintes fois envisagée par les bien-pensants de l’extérieur serait de ne plus continuer à alimenter ce trou sans fond, mais ce serait condamner les plus démunis à n’être que des loques humaines à travers les dix Départements géographiques du pays.
Nous, de Beaumont, avons la chance d’avoir vu le jour dans une commune réputée pour sa qualité de vie, mais nous nous sentons concernés par la dégradation programmée de notre Département, par la faute de dirigeants à courte vue. Nous, de Beaumont, croyons en ce slogan voulant qu’« un pays ne meurt jamais ».
Nous, de Beaumont, appartenons à une commune qui a longtemps été caractérisée par la saveur exceptionnelle de son café qui, aujourd’hui, n’est malheureusement qu’un vague souvenir. Forte de son idéal de production agricole, même en l’absence d’une assistance technique institutionnelle, Beaumont s’est convertie tranquillement en productrice de fruits, de légumes, de haricots, de maïs et de vivres alimentaires, faisant d’elle un grenier desservant Les Cayes et Jérémie.
Par sa position géographique sur le versant Nord de Pic Macaya, Beaumont constitue un trait d’union entre le Sud et la Grand-Anse, et cela depuis les mouvements de résistance menés par Goman en représailles à l’assassinat du fondateur de la nation, Jean-Jacques Dessalines.
C’est dans l’objectif de célébrer la mémoire de cet intrépide guerrier, originaire de notre ville, que nous, Beaumontoises et Beaumontois de partout, allons commémorer, d’un commun accord, les 200 ans de ce magnifique patelin, sous l’égide de notre légendaire Jean-Baptiste Perrier dit Goman.