Par Mérès Weche
En Haïti, à l’approche de l’an 2000, on s’alignait avec le reste du monde pour parler du Bogue, cette hystérie collective qui mit à mal bien des cœurs peureux. Ce qu’on craignait surtout, c’était le gel des ordinateurs, car de nombreux prophètes de l’informatique avaient prédit des catastrophes inimaginables, telles que les erreurs bancaires, des pannes de courant, des catastrophes nucléaires, etc. Qu’on se souvienne de Robert Bemer, cet employé d’IBM qui, en 1970, avait insisté auprès de ses patrons pour ramener les années à quatre chiffres dans le langage informatique, sinon il y aurait explosion à l’arrivée de la décennie suivante.
Quand vint 1980, Jérôme et Marilyn Murray publiaient, en 1984, » Computer in Crisisː How Avert the Coming Worldwide Computer Systems Collapse » ; un livre qui annonçait un chaos planétaire, depuis la prochaine décennie 90, jusqu’au tournant du 3e millénaire, si la situation n’était pas maîtrisée.
Au début des années 90, Peter de Jager, un informaticien canadien, publiait dans Computerworld un article titré Doomsday 2000, dans lequel il disait ː » Lorsque les douze coups de minuit sonneront, nos ordinateurs ne sauront plus quelle date afficher, et cela va avoir des conséquences catastrophiques dans plusieurs domaines de la vie sur terre « .
Comme de fait, en 1999, on nageait en pleine hystérie pré-bogue. La Croix-Rouge américaine conseillait aux gens de retirer de l’argent des banques, de faire plein d’essence dans les pompes et de prévoir des méthodes alternatives de cuisson alimentaire. La panique poussait même les riches à craindre le chaos dans les rues, jusqu’au pillage des magasins ; le tout, envenimé par le discours exagéré des médias à sensation et des prédicateurs religieux alarmistes. Pourtant, le 1er janvier 2000, depuis les pays du Soleil levant, l’éléphant avait accouché d’une souris.
Á la décennie d’après, c’est-à-dire en 2010, s’il y a un pays où le Bogue – par analogie- avait pris sa revanche, c’était en Haïti, appelé » le maillon faible de la Caraïbe » où, très tôt dans l’année, soit le 12 janvier, il avait montré ce dont il était capable, en brisant la grande majorité des symboles de fierté de ce pays.
Que nous réserve 2020 ? Il est vrai qu’aujourd’hui, en lieu et place du Bogue, il y a le Blog, géré par des apprentis-sorciers journalistes, photographes et vidéastes qui, non seulement, annoncent des catastrophes à tout bout de champ, mais qui aussi vivent de rapines politiques, tout en consolidant ces entreprises de corruption qui tuent le pays . On dirait que c’est dans ce sens-là seulement qu’Haïti a évolué. En 2020, il n’est que d’attendre. Toutefois, chers compatriotes, je « nous » souhaite une BONNE ET HEUREUSE NOUVELLE DÉCENNIE, marquant le 216e anniversaire de notre Indépendance nationale.