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Mon droit de mourir !
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Mon droit de mourir !

Par Carlile Perrin

Les jugements moraux nous portent souvent à réfléchir non seulement sur les lois morales mais également sur les conflits de valeurs en morale.

L’euthanasie me préoccupe en dépit de la diversité des sujets moraux. Ce mot apparemment simple a déjà fait débat à travers les grandes époques de l’histoire dans les différents recoins du monde.

L’euthanasie dans sa définition la plus simple signifie douce mort. On peut aussi faire référence au suicide assisté pour mettre le lectorat dans une plus parfaite imbibition du sujet en question. Beaucoup de pays ont légalisé l’euthanasie. C’est le cas de la Belgique et la Suisse.

Notons que l’euthanasie est de différents types: l’euthanasie active, l’euthanasie passive, le suicide assisté.

L’euthanasie active c’est le fait d’administrer à un malade une substance létale provoquant sa mort immédiate. L’euthanasie passive consiste à l’arrêt de tout traitement médicamenteux ou le fait d’administrer à un malade de fortes doses de sédatifs pour encourir sa mort au bout de quelques jours. Le suicide assisté ou aide au suicide est le fait de donner à un malade une substance mortelle qu’il s’administre lui-même.

Au regard de la philosophie, Éric Fourneret, spécialiste en philosophie morale de la technique et en éthique médicale, se questionne sur l’euthanasie et le suicide assisté. « Sommes-nous libres de vouloir mourir ? » Telle a été la question métaphysique soulevée dans son ouvrage portant cette interrogation comme titre.

La journaliste Morgane Rubetti, travaillant chez le Figaro, a publié sur le site  » le Petit journal » le 3 Août 2018 l’anecdote suivante : « Vincent Humbert âgé de 19 ans, après un terrible accident de la circulation s’est réveillé du coma tétraplégique, aveugle, sourd, muet. Seuls son cerveau et son pouce fonctionnaient. Avec l’aide de sa mère, il écrivit une lettre au président Jacques Chirac en vue de lui demander une faveur. Vous avez le droit de grâce monsieur le président et tout ce que je vous demande c’est le droit de mourir.»

Je ne vais pas m’attarder là-dessus mais laissez-moi attirer votre attention sur un fait marquant la condition de vie de tous les Haïtien.ne.s.

Pendant que dans d’autres pays des gens revendiquent le droit de mourir, peut-être à cause d’un grave accident ou d’une maladie incurable, ici, nous autres Haïtiens, nous demandons le droit à l’alimentation, à la santé, au logement, à l’éducation, aux meilleures conditions de vie…

Pendant que d’autres pays légalisent l’euthanasie, nous autres Haïtiens, nous pratiquons le suicide assisté par manque d’infrastructure sanitaire au sens poussé du terme. Quand notre dignité est attaquée, l’accès de vivre humainement est refusé, il nous reste quoi en terme d’humanité?

Un écolier voulant achever ses études primaires ou secondaires ? Un enseignant souhaitant se remettre au travail pour subvenir à ses besoins de chaque jour? Un parent qui, couvert de dettes, se voit obligé de rester à la maison ?

Nous sommes tous coupables de tout et de tous devant tous, moi, plus que les autres, eût à dire Dostoïevski. Je sais qu’à chaque fois que je ne participe pas aux votes, je devrais me la jouer coupable, mais mon vote n’aurait servi à rien si la majorité haïtienne choisit comme chef n’importe qui.

C’est le propre de l’Haïtien mineur, incapable de trier sur le volet celui ou celle qui deviendra citoyen numéro un du pays. Si je ne me trompe pas monsieur Jovenel Moïse a remporté les élections présidentielles par suffrage universel. Je ne sais pas où nous avons adopté cette manière de demander à un président de se retirer à la tête du pays, mais je doute fort que celle-là soit la meilleure à garder.

Morts, blessés, vol, viol, incendie, opposition cradingue, après avoir passé au peigne fin, ces mois de « lock » que nous venons de connaître sont notre diplôme pour le retour à la case départ. Un groupe de gens, se réclamant de l’opposition, paralysent le fonctionnement d’un pays qui essaie contre toute attente de s’ajouter à ceux qui sont en voie de développement déguisé.

Que voulons-nous faire D’Haïti?

C’est la première fois que je fais face à une situation aussi insipide. En 2004, j’avais six (6) ans. C’était ma première expérience de chaos politique en Haïti.

Aujourd’hui les souvenirs sont les seuls à y dormir. L’année 2019 n’avait pas bien commencé pour moi et malgré mes efforts, je ne suis pas satisfaite de mon accomplissement en tant que citoyenne de cette société vandalique dans laquelle j’ai eu la malchance de voir le jour.

Ce qui m’a beaucoup intrigué c’est la facilité avec laquelle les concernés ont fermé de force les portes de certaines écoles. Un ami et moi avions discuté et tiré comme conclusion à ladite situation que probablement les responsables voudraient avoir un pays insalubre, il l’est déjà, un peuple illettré. Le système éducatif haïtien fait l’objet de controverses et ce même groupe met en congé forcé tout apprenant.

L’éducation est la base de toute société, c’est ce qu’on répète souvent. C’est une phrase qui perd son sens dans l’action éducative en Haïti. Nombreuses gens ont encouru leur propre défaite et c’est nous, malheureuses victimes, qui en subissons les conséquences. Je suis d’avis que si un président est incapable de répondre aux exigences, ce pourquoi le peuple l’avait voté, qu’il remette sa démission. Je suis aussi d’avis que les formes de révolution ne devraient pas affecter aussi longtemps un pays comme Haïti où sur tous les murs est écrit le mot corruption. Même ceux qui sont contre le pouvoir n’ont pas les mains blanches.

Un bilan peu satisfaisant de cette année, clouée à la maison, bouche cousue par peur. Je ne demande pas au président de démissionner ni aux opposants de stopper leur lutte infructueuse. La situation politique m’a tellement déprime et plein de choses me sont arrivées.

Je n’ai pas assez de courage pour en parler publiquement et demander conseil. Je me fais opérer bientôt, c’est fréquent les malades qui meurent aux hôpitaux par manque de soin. Je ne sais pas comment mon opération se passera, peu importe.

Rien ne m’étonne depuis un bon bout de temps. Cependant, je serais heureuse et je n’aurais pas connu comme tant d’autres Haïtiens ces tourments affreux si la mort pouvait m’arracher à l’arbre de vie, je serais heureuse de ne plus mourir à chaque soleil levant et à la tombée de la nuit. Tout comme mes pairs qui sollicitent le droit de mourir.

Permettez-moi de demander au président actuel, si je dois l’appeler par son nom, et aux opposants, le droit de mourir dans un pays bien tenu et qui fonctionne dignement.

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