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Semaine du documentaire/« I am not your Negro » : Raoul Peck persiste et signe
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Semaine du documentaire/« I am not your Negro » : Raoul Peck persiste et signe

Par Voltaire Jean

Le jeudi 12 décembre 2019, dans une Port-au-Prince plutôt dépressive, qui a encore du mal à se débarrasser de ses barricades séculaires, un public nombreux, composé en majeur partie de jeunes, a fait le déplacement à la FOKAL pour assister à la projection de « Je ne suis pas votre nègre » du réalisateur Raoul Peck. Une activité inscrite dans le cadre de la première édition de la Semaine du film documentaire.

Ce long métrage documentaire à succès (César du meilleur film documentaire en 2018) inspiré de l’ouvrage inédit « Remember this house » de James Baldwin (1924-1987), retrace la lutte des Noirs Américains pour les droits civiques, précisément en cette période des années 60, une décennie de haines raciales aux Etats-Unis d’Amérique qui a vu l’assassinat de trois grandes figures du monde afro-américain : Medgar Evers en 1963, Malcom X en 1965 et Martin Luther King, 1968. Trois meurtres crapuleux qui ont profondément marqué l’auteur et joué un rôle déterminant dans sa critique de l’Amérique blanche.

« L’Amérique n’est pas le pays des hommes libres » dit Baldwin. Le réalisateur de Patrice Lumumba : la mort du prophète (1990) le reprend à son compte et l’assume. Admirablement servi par la dextérité d’Alexandra Strauss au montage, Peck mobilise, en effet, toutes les ressources du septième art pour exposer avec crudité la situation du Noir dans une société américaine encore profondément ségrégationniste, malgré les deux mandats de Barak Obama.  Mises en abîme (une magnifique façon pour le réalisateur de revisiter avec un œil critique, bien sûr, quelques grands classiques du cinéma hollywoodien), flash-back, voix-off (la voix  de Samuel L Jackson donnant corps au récit du romancier), gros plans en noir et blanc (une technique chère au cinéaste depuis Haitian Corner, son premier long métrage fiction, 1987), de longs travellings (pour évoquer les périples de Baldwin) restituent à l’image toute sa puissance narrative et permettent de dresser sans fard, comme le rêvait Baldwin, le portrait de cette Amérique blanche, avec ses lynchages (on se rappelle ces drôles de fruit  de Billie Holiday), ses incendies, ses torches allumées dans la nuit noire, ses tueries, ses brutalités policières, ses majorettes aussi. Une véritable radiographie de l’Amérique capitaliste blanche.

Cette Amérique « aveugle », selon Baldwin, où le « rêve américain », plus de quarante ans après la Loi sur les droitS civiques (1964) demeure encore, pour une bonne majorité de Noirs, un cauchemar. Cette Amérique capitaliste blanche qui, plus de trente-cinq ans après les « sanglots » vietnamiens, continuant d’agir comme si on était encore à l’ère de la politique du « Big stick », agresse le Venezuela chaviste, renforce ses mesures économiques criminelles contre Cuba, humilie Haïti et son peuple, déstabilise la   Bolivie d’Evo Morales.

Le Noir n’existe pas, dit encore Baldwin à travers la voix sublime de Samuel. L. Jackson. C’est un produit de l’imaginaire du Blanc qui lui- même est une « métaphore du pouvoir » dont l’épicentre est au Chase Manhattan Bank. Encore du cinéma militant, diront certains, mais qui heureusement ne cesse de nous étonner et de nous éclairer.

Rappelons que la Semaine du film documentaire se déroule du 9 au 16 décembre à Port-au-Prince. Comme pour continuer à cultiver l’espérance !

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