Par Evens Dossous
« San Senyen » est un poème fleuve sur une quarantaine de pages, paru aux éditions Miroirs, et dont les poèmes sont illustrés par des dessins de Mario Vilvalex.
Le poète William Saint Cyr a pris la réalité actuelle du pays comme centre de réflexion et cadre thématique. C’est son deuxième recueil après « Souf nan tchou ».
Dans ce long poème, on trouve divers thèmes comme la mort, la politique, l’amour, la nostalgie, … capables de nous éveiller la conscience, de nous rendre notre part de sensibilité face à la vie prise en otage.
« San Senyen » est une invitation non pas à une fête, mais à regarder comment notre capitale est prise au piège.
« … Règ pòtoprens vini
Vin gad jan figi bwadchenn gen pli
Cheri
Règ vil lan fè eskandal nan tout fouk
Tout tèt gen konprès
M pa benyen
Pou evite dlo pa pranm pou kliyan
Vil lan dòmi sou do
Sa rann papa bonDye kouri lwen l
Gade se tchoul nawè
Louvri nègrès
Ann gad tèt vil lan
Nanpwen baboukèt
pou djòl alèlè
pa di m fèzè si m di vil la salòp… »
Dans ce recueil, William Smith Saint Cyr revient dans la conception du poète de Baudelaire qui a affirmé que « le poète est moraliste sans vouloir, par plénitude de nature ».
Parce qu’il ne reste pas indifférent, parce que sa plume lui permet de photographier la réalité, prenant de temps en temps une autre allure, le poète s’est dit conscience, il ne se mêle plus à certaine chose. Au fait, s’il les voit, ce n’est pas par volonté, mais juste parce qu’il est là, comme tout le monde, par hasard. Il a choisi de fermer les yeux d’un côté pour pouvoir les ouvrir de l’autre. Ainsi, il s’en prend à critiquer l’hypocrisie des gens qui se croient forts que quand l’urgence se fait sentir. Et cette union devient force quand le malheur est commun.
« … Gade non Zanmi!
Se tout bon vre
Chak yon katastwòf tchwe anpil nan nou
Pa pil
Pa makòn
Nou sonje se sèl lanmou ki dwe kenbe n ?
Ebyen Viv gwo evenman
« San Senyen » est ponctué d’un sentiment d’amour qui revient, par moments, dans le texte, comme un mot d’ordre. Et cela a pris des formes différentes. Le thème amour y est traité mais pas dans cette perspective romantique où l’amour est la seule façon d’appréhender la vie. Mais, l’amour, dans ce texte, est de préférence un prétexte pour parler de son mal du temps.
Le poète revient sur son âge, et à chaque fois, l’amour est invité. Il passe de la morale à la nostalgie, son âge lui est apparu comme un fardeau du temps, et cela lui rappelle qu’il n’est pas trop loin de sa fin.